Le Kaffehaus : plus qu’un lieu, une grande culture
D’aussi loin que les autrichiens s’en souviennent, les cafés ont toujours été des lieux de vie et d’échanges où l’on pouvait s’assoir pendant des heures, voire des journées, sans même avoir à commander. La tradition d’un accueil comme à la maison, la Culture des cafés viennois ou Wiener Kaffeehauskultur en allemand, a même été inscrite au Patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO en 2011.
Au XIXe siècle, les journalistes, les écrivains, les grands penseurs y sont venus travailler pendant des heures, profitant de décors uniques, dans les styles les plus fastueux et parfois, plus sobre. Les affaires sont conclues, les relations humaines se construisent et se défont autour d’un café traditionnel, le « mélange » : c’est un simple café au lait réhaussé de mousse de lait. Chaque enseigne a sa manière de faire et décline la tradition du café dans une carte aux nombreuses recettes. Le chocolat et le thé suivent en général la tendance.
Le Café Central, le palais des intellectuels
S’il ne devait y en avoir qu’un, ce serait lui. Créé en 1876, le Cafe Central accueilli la crème de la crème des intellectuels. Léon Trotski, Sigmund Freud, Joseph Staline… « Lorsque je ne suis pas au café Central, je suis en chemin pour y aller » disait Peter Altenberg : il s’y faisait livrer son courrier et il paraît qu’il y faisait même ses lessives !
Né pendant à la fin de la période prospère du Günderzeit, il est typique des fastes architecturales et décoratives de cette époque. Inspiré des modèles florentins et vénitiens, celui qu’on appelle le Palais Ferstel est tout en colonnades et en sculptures. A l’intérieur, les voutes dorées et colorées sont luxueuses.
Le petit bémol : Le Café Central est parfois victime de son succès et les foules de visiteurs s’y pressent. L’authenticité y perd un peu.
Où ? 14 Herrengasse dans le 1er arrondissement
Qu’est-ce qu’on commande ?
De la célèbre Wiener Schnitzel – escalopes de veau pannées - aux Zacher Würstel – une saucisse de porc et de bœuf -, vous pourrez déguster les plats typiques de Vienne et de toute l’Autriche : le Cafe Central est aussi un restaurant. Pour être au plus près de la tradition, prenez un bon café à la crème fouettée ou « Schlagobers », accompagné de Marillenpalatschinken – de bonnes crêpes à la confiture d’abricot.
Le Café Sacher et son célèbre gâteau au chocolat
Fondé par le célèbre pâtissier Eduard Sacher, l’actuel palace fut à l’origine une simple maison d’hôtes qui évolua peu à peu en hôtel pour les notables et l’aristocratie autrichienne, puis enfin un vrai palace. Les cuisines ont vu naître le fameux Sachertorte, un gâteau au chocolat créé pour le prince de Metternich.
Ses salons brillent sous les tissus rougeoyants. Même avec une décoration un peu chargée, le café Sacher se veut l’un des plus élégants de Vienne. Le meilleur reste encore sa terrasse, très agréable en été, au cœur de la très belle architecture viennoise.
Où ? Au 4 de la rue Philharmoniker, près de l’Opéra dans le 1er arrondissement.
Qu’est-ce qu’on commande ? Un Sachertorte bien entendu ! Généreux, le gâteau au chocolat s’élève sur deux couches de génoise au chocolat entre lesquels est insérée une fine couche de confiture d’abricot, la Marille. Il est enrobé d’un glaçage de chocolat noir, et toujours servi avec de la crème fouettée – « Obers ». On vient du monde entier pour le déguster, et il est l’objet d’une grande controverse…
Le café Schwarzenberg, le plus traditionnel
L’ambiance est à la fois chic est cozy. Fauteuils de cuir sombre, grands miroirs, lumière scintillante… il est assez intimiste. Il est le plus ancien café de la Ringstraße, soit le plus beau boulevard du monde, d’après les Viennois : lui aussi en vit passer du beau monde ! Alors qu’il était plutôt fréquenté par les riches entrepreneurs et les hommes d’affaires, il fut la deuxième maison de l’architecte et designer Hoffmann. En été, on y déjeune en Schanigarten – en terrasse. Aujourd’hui, on y vient surtout pour sa programmation de concerts et de lectures.
Où ? Au 17 Kärntner Ring, dans le 1er arrondissement
Qu’est-ce qu’on commande ? De novembre à février, c’est la saison des bals de Vienne : dans le plus pur respect de la tradition, vous pourrez ici déguster un vrai goulash austro-hongrois – ragout de viande au paprika – servi avec de la bière pour votre petit déjeuner.
Le café Frauenhuer, l’intemporel
Il fêtera bientôt ses 200 ans ! Il fut créé en 1824, en place du restaurant de Franz Jhan, chef pour l’impératrice Marie-Thérèse où jouèrent Mozart et Beethoven. Aujourd’hui, on aime s’installer confortablement sur ses banquettes rouges cramoisies, sous les voûtes blanches et accueillantes du plafond. On aime aussi sa décoration beaucoup plus sobre que de nombreux cafés traditionnels viennois, et son air intemporel.
Où ? Au 6 Himmelpfortgasse, dans le 1er arrondissement.
Qu’est-ce qu’on commande ? Les plats traditionnels rivalisent en goût. Le kaiserschmarrn y est réputé : il est une crêpe épaisse coupée en lanières, saupoudrée de sucre glace servie avec des raisins de Corinthe et de la compote de pommes ou de prunes. Attention, ça ne se mange pas au dessert, c’est un plat sucré. Au visuel, ça ne paye pas de mine mais c’est l’idée… et surtout, c’est délicieux !
Le café Hawelka, le café des artistes
Tout en bois, le Hawelka mise sur son ambiance des plus chaleureuse plutôt que sur les ors autrichiens : tout en sobriété, son charme est authentique. Créé en 1939, il fut fermé pendant la guerre et réouvrira en 1945. Là, les artistes et grands écrivains s’y retrouvèrent, jusqu’aux années 60 dont Arthur Miller, Lawrence Durell… A l’époque, alors que les soirées s’éternisaient, on sortait les buchteln du four pour rassasier tout ce petit monde.
Où ? Au 6 Dorotheergasse, dans le 1er arrondissement.
Qu’est-ce qu’on commande ? Au délicieux café, et des buchteln ! Originaires de Bohême, ils sont de petites brioches fourrées de marmelade.
Le café Landtman, le café des stars
Né en 1873, il reste l’un des cafés les plus célèbres de la ville. Parmi les habitués, on compte Sigmund Freud, Thomas Mann, Marlene Dietrich, Gary Cooper… qui ont été remplacés aujourd’hui par les personnalités politiques, les journalistes et les artistes de Vienne : il est à deux pas du siège de la Chancellerie fédérale, de la Mairie, du Burgtheatre et de l’Université.
Son décor est plutôt classique, de boiseries sombre et de lustres clinquants. L’ambiance est feutrée, et on se laisse facilement aller dans les banquettes moelleuses.
Où ? au 4 Universitätsring, dans le 1er arrondissement.
Qu’est-ce qu’on commande ? La spécialité de l’établissement, la Maroniblüte, pour accompagner son café : c’est une gaufrette recouverte d’une mousse de châtaigne, avec un soupçon de griotte. A Vienne, elle sonne l’arrivée de l’automne.
Le café Sperl
Né en 1880, le café Sperl prend soin de garder sa déco d’époque. Banquettes de velours, boiseries, tables de billards, cuivres et moulures… il est peut-être le plus typique. C’est ce qui lui vaut plusieurs apparitions au cinéma, comme dans a Dangerous method de David Cronenberg ou Before Sunrise, de Richard Linklater. Pour rester dans l’esprit du lieu, des lectures de grandes œuvres littéraires s’y tiennent régulièrement, tout comme des concerts. Tous les dimanches, les notes du piano accompagnent votre goûter.
Où ? au 11 Gumpendorferstrae
Qu'est-ce qu'on commande ? Le Sperl torte, une spécialité de la Maison, avec du chocolat au lait, de la vanille, de la cannelle et de la pâte d'amande.